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Arrêt EDF / Greenpeace : intelligence économique, intrusion dans un système de traitement automatisé de données …
Par un arrêt en date du 6 février 2013, la Cour d’appel de Versailles a relaxé la société EDF, poursuivie dans l’affaire du piratage informatique de l’association Greenpeace. Depuis quelques années, de nouvelles formes de criminalité, commises par l’intermédiaire d’internet, ont vu le jour. Certaines d’entre elles sont particulièrement redoutées par les organismes, qu’ils soient publics ou privés : tel est le cas du piratage informatique. Plus communément qualifié « d’intrusion dans un système informatique », cette infraction est réprimée à l’article 323-1 du Code pénal. Cet article dispose que : « le fait d’accéder ou de se maintenir, frauduleusement, dans tout ou partie d’un système de traitement automatisé de données est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende ».
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En savoir plus :
Par Antoine Cheron, ACBM Avocats, pour village-justice.com
Source http://www.village-justice.com/articles/Arret-Greenpeace-intelligence,14547.html
EXCLUSIF ! L’espion de l’affaire EDF parle
Philippe Lobjois
Thierry Lorho, 44 ans, ancien agent de la DGSE, est au cœur de la tourmente. C’est lui, le patron de la société Kargus, dont tout le monde parle dans le petit milieu de la sécurité. EDF a utilisé Kargus Consultants pour pirater l’ordinateur de Yannick Jadot, ancien responsable des opérations de Greenpeace France. Le juge d’instruction Thomas Cassuto, au tribunal de Nanterre, a mis en examen Pierre François, ingénieur protection de site d’EDF, ainsi que T. Lorho et l’informaticien qui a pénétré le réseau de Greenpeace. Aujourd’hui, en exclusivité pour lerenseignement.com, Thierry Lorho se justifie : oui, il assume la pénétration illégale, « sur ordre d’EDF ». Et il aimerait que son donneur d’ordre reconnaisse ses responsabilités. « Droit dans ses bottes », Thierry Lorho ne regrette rien : pour lui, Greenpeace est une organisation dangereuse, qui menace les intérêts nationaux.
« J’assume complètement la mise sous surveillance de l’ordinateur du responsable de Greenpeace Yannick Jadot, mais je n’assumerai pas le reste et j’aimerais bien que EDF, qui a commandité l’opération, prenne aussi ses responsabilités. »
Thierry Lorho ne mâche pas ses mots. Sa mise en examen par le juge d’instruction Thomas Cassuto a encore du mal à passer.
Toute l’histoire remonte à 2006, quand EDF, soucieuse de sa sécurité, décide de renforcer ses défenses face à l’ennemi de toujours : Greenpeace. Car quand on est un gros industriel, que l’on gère des centrales nucléaires sur le territoire national, et que l’on est en passe de devenir l’un des géants européens de l’énergie, on ne plaisante pas avec la sécurité.
« Là ou le gouvernement devrait accompagner et protéger ce type d’entreprises, il ne fait rien, continue Thierry Lorho. Aussi les groupes industriels se défendent comme ils le peuvent et se tournent vers le privé. »
Sauf que, en France, l’intelligence économique est mal perçue et souvent assimilée à des barbouzeries d’officines. Pour le consultant en sécurité, le grand public ne se rend pas compte que c’est une véritable guerre souterraine qui se joue à présent entre groupes industriels.
« L’Intelligence économique, c’est vieux comme le monde. Autrefois, on appelait ça espionnage industriel. Je mets au défi quiconque de me citer un seul grand groupe qui ne l’ait pas pratiquée une fois ! »
Et d’envier les pratiques anglo-saxonnes : « Outre-manche, les services de l’État épaulent les entreprises du Royaume sans état d’âme. Eux n’ont pas cet angélisme hypocrite, cette prudence de sainte nitouche que l’on retrouve en France ! »
Et d’évoquer les cas célèbres de guerres industrielles qui opposèrent Airbus et Boeing : « À l’époque se souvient Lorho, la NSA avait été mise à contribution pour écouter les conversations des négociateurs d’Airbus. Et pourquoi s’en priveraient-ils s’ils détiennent les outils ? »
À la question soulevée de savoir si Kargus a espionné Greenpeace en Angleterre, Thierry Lorho répond :
« Nous n’avons pas infiltré Greenpeace Angleterre comme l’on dit ces derniers jours, mais nous voulions savoir comment fonctionne l’organisation. Effectuer une cartographie de Greenpeace et anticiper leurs actions illégales à l’encontre de EDF… »
Thierry Lorho justifie le bien-fondé de son travail pour EDF : « Il y a quelques années, Greenpeace France a été approchée par des militants écologistes algériens, en fait des islamistes durs qui voulaient tout savoir des centrales nucléaires françaises. Démasqués à temps, ces derniers ont été écartés rapidement du territoire français. »
Qu’en aurait-il été s’ils avaient réussi leur coup ?
« Dans le cas dont on parle aujourd’hui, lors de notre enquête, la vraie question pour nous était de savoir qui finance Greenpeace explique Thierry Lorho. Comment savoir qui se cache réellement dans les rangs d’une organisation comme Greenpeace, qui sont les généreux donateurs de l’organisation ? Lorsqu’une organisation humanitaire ou écologiste reçoit des millions d’euros d’une association ou d’une société, elle ne peut plus rien refuser à son généreux donateur, mais si ce donateur se révèle être un pays ou un service secret adverse, l’organisation est pieds et poings liés ! »
La méfiance des consultants en sécurité touche aussi les militants de Greenpeace : « Greenpeace est le type même de l’organisation européenne tentaculaire qui pratique des actions para militaires de type commando. Or la France n’y fait pas attention, et c’est une erreur. Lors de la mise en place d’un convoi de plutonium, on laisse approcher plus facilement des écologistes que des hommes avec des cagoules sur la tête », assène-t-il, et d’ajouter :
« Lorsque les militants débarquent en France pour une action « illégale », ils viennent de toute l’Europe. Hollandais, Anglais, Italiens, Allemands. Et ils ne sont pas tous très pacifiques ! »
Et de rappeler que l’éco-terrorisme est une réalité outre-Manche.
Lorho se défend d’avoir « dérapé » ou outrepassé les ordres : il est resté dans le cadre de sa mission définie par ses donneurs d’ordre, aujourd’hui aux abonnés absents : « EDF aurait dû communiquer sur l’affaire en reconnaissant que oui, c’était illégal de pénétrer l’ordinateur de Yannick Jadot mais que déstabiliser le plus gros groupe européen d’énergie et commettre des actions sur les centrales nucléaires l’était encore plus ! Mais en France, on en est resté au temps du Rainbow Warrior, et on préfère s’auto- flageller… »
Et de conclure : « Personnellement, je n’ai pas à rougir de l’action entreprise contre Greenpeace. Je l’ai fait pour défendre un grand groupe industriel français. Peut-être que cette histoire accélérera la prise de conscience du gouvernement sur ce sujet. Oui, les entreprises françaises ont besoin de se défendre alors que les gouvernements les délaissent, et oui, une vraie politique sur la sécurité du patrimoine industriel devra être pensée ! Que Greenpeace continue de s’occuper des baleines, c’est ce qu’ils font de mieux, mais qu’ils s’éloignent des centrales nucléaires françaises !
Il n’est pas certain que les instances dirigeantes d’EDF apprécient ce soutien sans état d’âme, mais une chose est sûre : le message de leur ex-consultant a le mérite de la clarté.
Philippe Lobjois
Reporter de guerre, Philippe Lobjois est spécialisé dans le journalisme d’investigation. Son dernier ouvrage, Mercenaire de la République, 15 ans de guerres secrètes, co-écrit avec Franck Hugo, paraîtra le 15 mai chez Nouveau Monde éditions.
Publié le 28/04/2009
http://www.lerenseignement.com/00_koama/visu_espionnage/index.asp?sid=339&cid=13312&cvid=20400&lid=1