La scène se joue le 13 février 2008 autour d’une table de restaurant, face à la gare Lille-Flandres. Un détective a rendez-vous avec sa cliente pour évoquer une affaire d’adultère. L’homme, qui se dit ancien policier, demande un acompte de 300 E en liquide et autant à la fin de l’investigation. Mais il fournit de faux documents qu’il a fabriqués en utilisant le nom d’un vrai cabinet lillois, Abaci. Le « privé » qui se présente à la dame est, en réalité, agent administratif à Cambrai. Il ignore, par contre, que sa cliente n’en est pas une, non plus : c’est une vraie détective qui, avec un collègue, Lorenzo Dieguez, le patron d’Abaci, piste l’imposteur depuis plusieurs semaines. Les masques tombent, le suspect est interpellé et remis aux enquêteurs des délégations judiciaires de la Sûreté de Lille.
Influencé par un reportage à la TV
L’homme, âgé de 35 ans et qui répondait au mail d’« enigma59 », a été jugé, hier, en audience de reconnaissance préalable de culpabilité au tribunal de Cambrai. Poursuivi pour escroquerie et usage d’un titre attaché à une profession réglementée, il a été condamné à deux mois de prison avec sursis et 1 500 E de dommages et intérêts à verser à la victime, le cabinet lillois Abaci. L’avocat de ce dernier, Me Vincent Platel, souligne aussi le préjudice des clients : « Il a reconnu avoir travaillé pour deux personnes en tout entre juin 2007 et février 2008 grâce à des annonces sur des sites internet. Il aurait suivi un mari pour son épouse et lui aurait remis des photos contre de l’argent. Mais il n’a pas le diplôme ni l’agrément préfectoral ni l’inscription au registre du commerce, obligatoires pour un détective. Donc les rapports qu’il rédige ou les documents qu’il rend n’ont aucune valeur légale. Et les clients espèrent parfois les présenter en justice… » Le prévenu n’était pas attiré par l’argent : « Il explique avoir été influencé par un reportage à la télévision sur le métier de détective. Il a voulu « essayer », mais sans suivre la formation. Et finalement, il s’est dit ‘impressionné’ par les suites judiciaires. Lorsqu’un futur client consulte une annonce, il doit d’abord vérifier qu’elle paraît dans des pages professionnelles et qu’elle contient un agrément et une immatriculation. » • A. D.