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Mission du détective

Posté par Arnaud Pelletier le 8 février 2008

L’image qui tient une place privilégiée dans le cœur des particuliers, c’est celle du détective en planque devant la façade d’un hôtel vieillot, un appareil photo en bandoulière, et attendant la sortie des amants fautifs qu’il file pour le compte du mari ou de l’épouse.

Cette mission-là ne représente plus la majorité des affaires du détective.

Aujourd’hui, de par l’évolution des mœurs et des facteurs économiques et sociaux, ce sont surtout les affaires commerciales et industrielles qui priment, ou encore les litiges mettant en cause un particulier ou une entreprise dans ses rapports avec la société, ses partenaires, ou les tribunaux.

En bref, le Détective a pour mission de rechercher et d’établir toute preuve en vue de la manifestation de la vérité.

1- LA PROCEDURE DE DIVORCE

Depuis la loi du 11 juillet 1975 portant réforme sur le divorce, on peut se séparer soit par consentement mutuel, soit par suite de rupture de la vie commune, soit pour faute.

Dans le cas du divorce pour faute, si les juges sont souverains pour en apprécier la gravité et prononcer le divorce aux torts exclusif de l’une des parties, ils ne peuvent prendre leurs décisions qu’au vu des pièces fournies par la partie qui invoque la faute.

C’est dans l’établissement de la preuve que le Détective a son rôle à jouer par ses recherches et le rapport qu’il fournit ensuite et qui sera remis au juge.

Parfois même, certains avocats demandent au Détective d’effectuer une enquête aux fins de préparer un constat d’Huissier qui reste encore aujourd’hui l’acte authentique par excellence et qui souffre difficilement la preuve du contraire.

Lorsque les intérêts en jeu sont importants, en particulier pour la garde des enfants ou le paiement d’une prestation compensatoire ou d’une pension alimentaire, le Détective doit, dans certains cas, faire un état du patrimoine, rechercher les biens éventuellement détournés, prouver une fraude, etc…

Le champ d’activité est vaste, encore faut-il que dans ce cas précis du divorce, le travail du Détective soit reconnu utile, au même titre que celui d’un enquêteur social mandaté par les juges et que le rapport de fin de mission ne soit pas considéré comme une simple attestation d’un témoin à charge.

2- AFFAIRES PRIVEES ET COMMERCIALES

Elles sont nombreuses et regroupent tout ce qui concerne l’administration de la preuve dans tous les secteurs où peuvent naître des litiges, qu’ils soient financiers, civils, ou commerciaux.

Le détective va donc être compétent dans les domaines suivants :

  • Recherche de débiteurs, de personnes disparues

  • Enquêtes de solvabilité, de patrimoine

  • Localisation et restitution de matériels ou véhicules financés

  • Enquêtes de moralité, de pré-embauche,

  • Enquête sur un futur associé

  • Concurrence déloyale (lorsqu’elle est définie par une clause du contrat)

  • Enquêtes d’assurances

Il n’y a pas de limites à ce secteur d’activité, sinon que l’enquête doit être à but légitime, c’est à dire qu’elle doit nécessairement se justifier et il faut savoir que les mineurs ne peuvent faire l’objet d’une filature, que les enquêtes politiques sont à éviter et que celles qui concernent la drogue sont à bannir….

3- AFFAIRES INDUSTRIELLES

L’évolution économique des pays a internationalisé la recherche privée. C’est ainsi que le Détective voit son champ d’action s’étendre pour devenir parfois du partenariat avec les grandes entreprises dont les intérêts nécessitent des actions préventives contre la fraude en général.

Le détective va bien souvent effectuer un véritable travail de contre espionnage industriel, en agissant dans les domaines suivants :

  • Vols et détournements dans les entreprises

  • Contrefaçon

  • Protection des marques et brevets, etc…

Notons bien sûr que si l’Agent de Recherche peut détecter un matériel d’écoute, il ne peut EN AUCUN CAS accepter de poser ce matériel pour le compte d’un client, ce fait étant passible de poursuites et de sanctions pénales.

Le faux témoignage étant lui aussi pénalement réprimé, il est important que le rapport de fin de mission du Détective soit établi sur la base de faits véridiques et vérifiés, qu’il soit clair et circonstancié et qu’il ne comporte aucun jugement personnel.

source : CNSP-ARP

Actualité sociale et juridique

Posté par Arnaud Pelletier le 22 novembre 2007

Actualité sociale et juridique récente, en provenance de Legalis.net :

31/10/07 – Cybersurveillance : la demande d’intervention du salarié valide le mode de preuve

(JPEG) Un cadre d’un établissement d’enseignement catholique, à qui sa direction reprochait la consultation répétée de sites pornographiques sur son lieu de travail, avait été licencié pour faute grave. Dans un arrêt du 10 octobre 2007, la chambre sociale de la Cour de cassation a validé la procédure de licenciement. Cette sanction faisait suite à l’intervention de l’entreprise gestionnaire du système du réseau de l’établissement appelée par le salarié se plaignant de la présence d’un virus informatique sur son poste de travail. La cour a confirmé la décision de la cour d’appel de Montpellier du 17 mai 2006 qui avait jugé que les faits n’avaient pas été portés à la connaissance de l’employeur à l’aide de moyens de preuve clandestins ou illicites.
Si ce mode de preuve est donc admis, il faut néanmoins rappeler le contexte particulier de cette affaire qui concerne un établissement d’enseignement catholique. La cour d’appel avait en effet considéré que le salarié avait failli à ses obligations d’enseignant et d’éducateur « de conserver la dignité inhérente à sa fonction et de respecter le caractère propre de l’établissement », figurant à la convention collective des professeurs du secondaire de l’enseignement privé.
De manière générale, on peut se demander si le technicien appelé pour un dépannage devait dénoncer ces faits qu’il avait constatés après examen du disque dur à l’employeur du salarié utilisateur du poste de travail ? Une question à laquelle les administrateurs de réseau, qui ne sont pas tenu au secret professionnel, sont souvent confrontés.

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26/10/07 – Mise en ligne du décret sur le droit de réponse

(JPEG) Le décret qui précise les modalités de mise en œuvre du droit de réponse sur internet a été publié au Journal officiel du 26 octobre 2007. Prêt depuis mars dernier, il devait cependant être notifié aux autorités communautaires afin de recevoir les commentaires des autres Etats membres.
La loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique avait introduit le droit de réponse en ligne mais de nombreux points pratiques devaient encore être fixés par décret en Conseil d’Etat. Si ce nouveau texte encadre ce droit dans un contexte numérique, il n’a cependant pas résolu toutes les difficultés susceptibles de surgir dans sa mise en oeuvre. Ainsi, la demande d ’exercice du droit de réponse doit-elle être adressée au directeur de la publication. Or, le droit à l’anonymat des éditeurs de sites personnes physiques risque d’être un obstacle à l’exercice du droit de réponse. Dans ce cas, il faudra sans doute s’adresser à l’hébergeur dont on n’est jamais sûr qu’il dispose des données d’identification fiables.
Le décret précise par ailleurs que la procédure ne peut être engagée « lorsque les utilisateurs sont en mesure, du fait de la nature du service de communication au public en ligne, de formuler directement les observations qu’appelle de leur part un message qui les met en cause ». Le droit de réponse disparaît-il lorsqu’il existe à la suite d’un article une partie commentaire permettant de réagir ? Cela vise probablement aussi les chats ou les forums de discussion non modérés. Dans le cadre d’une modération, ce droit pourrait s’appliquer en cas de suppression d’un message de réponse.
Un autre point risque de poser des problèmes d’application. Le décret prévoit que ce droit porte sur les textes, les sons ou les images. En revanche, la réponse devra prendre la forme d’un écrit équivalent à la longueur du message qui l’a provoqué. Cela ne va pas être facile à appliquer aux sons ou aux images. Le décret prévoit en effet que dans ce cas la longueur de la réponse doit correspondre à celle de la transcription sous forme de texte des documents litigieux.

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26/10/07 – 5 ans de prison ferme pour une escroquerie « à la nigériane »

(JPEG) Qui n’a jamais reçu un courrier électronique d’un individu offrant une forte récompense pour l’aider à faire sortir de l’argent bloqué à l’étranger ? La plupart d’entre nous supprimons ces offres alléchantes, fleurant l’arnaque à plein écran. Mais certaines personnes attirées par l’appât du gain se laissent tenter. Parmi elles, un retraité qui avait commencé par mordre à l’hameçon a fini par porter plainte. Après quelques mois d’enquête, le réseau d’une escroquerie « à la nigérienne » a été démantelé et les personnes arrêtés. Elles avaient commis l’erreur de se déplacer pour les remises de fond, au lieu de s’abriter prudemment derrière leur ordinateur et d’utiliser les mandats pour récupérer l’argent. Six personnes, dont une toujours en fuite, ont été jugées par le TGI de la Roche-sur-Yon. Le 24 septembre 2007, le tribunal a prononcé deux condamnations à 5 ans de prison ferme et une à trois ans pour escroquerie réalisée en bande organisée ainsi qu’une peine de dix-huit mois de prison avec sursis pour recel.
Au printemps 2006, un retraité vendéen reçoit sur sa boîte aux lettres électroniques un message d’une femme prétendant travailler pour un diplomate, décédé en lui laissant une mallette contenant 17 millions de dollars. Or, lui écrit-elle, pour faire sortir ces fonds d’un pays africain (douanes, papiers, etc.), elle a besoin d’argent et elle lui demande de l’aider en échange de quoi, elle lui promet de lui reverser 25% de la somme bloquée. Le retraité naïf mais aussi cupide tombe dans le piège. Il va envoyer plusieurs petites sommes par mandat. Puis un jour, on lui donne rendez-vous dans un hôtel parisien où on lui présente une valise remplie de billets de banque noircis, pour soi-disant échapper à la vigilance des douanes. Un pseudo directeur de laboratoire va tenter de le convaincre d’acheter pour 48 000 euros un produit seul capable de blanchir (sans jeux de mots) les billets. Les arnaqueurs sont allés trop loin au goût de ce retraité qui arrêtera là les frais. Si
x autres personnes se sont portées partie civile.

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L’utilisation de courriels personnels comme moyen de preuve d’un débauchage d’employés

24/10/07

(JPEG) Des courriels personnels envoyés depuis une messagerie professionnelle peuvent-ils servir de preuve à un employeur en conflit avec un salarié ? C’est une des questions posées à la Cour de cassation à l’occasion d’un pourvoi formé par un salarié licencié pour avoir débauché quatorze de ses collègues et être parti avec le plus gros client de la société. L’arrêt du 25 septembre 2007 n’apporte pas de réponse à cette question, les juges estimant que les attestations fournies par l’employeur suffisaient pour établir la réalité de ces faits.
On peut regretter que la Cour de cassation ait manqué une occasion de préciser les conditions auxquelles il est possible d’accéder aux messages privés susceptibles de porter atteinte aux droits de l’entreprise. Pour savoir qu’un e-mail contient une proposition de débauchage ou une fuite d’information, encore faut-il y avoir accès. Or la jurisprudence issue de l’arrêt Nikon interdit à un employeur de prendre connaissance des messages qualifiés de privés par le salarié. On se retrouve ainsi face à une impasse qui nécessiterait une réponse de la part de la Cour de cassation. Un arrêt de principe rendu en assemblée plénière permettrait de clarifier cette situation et de déterminer clairement ce qu’il est possible ou non de faire.

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15 000 euros de dommages et intérêts pour vente de contrefaçon de parfum sur eBay

22/10/07

(JPEG) Un internaute ayant mis en vente sur eBay un flacon de parfum sur lequel était apposée la marque « Trésor » a été condamné, par un jugement du TGI de Lilles du 17 janvier 2007, à payer à la société Lancôme 15 000 euros de dommages et intérêts pour contrefaçon et concurrence déloyale.
Le célèbre parfumeur avait constaté que plusieurs produits revêtus de ses marques, dont la marque « Trésor », étaient proposés par un même vendeur sur eBay. La société avait alors commandé un parfum pour 50,37 euros à cet internaute. Une fois le produit reçu, elle avait pu vérifier qu’il s’agissait bien d’une contrefaçon et s’assurer de l’identité du vendeur afin de procéder à une saisie-contrefaçon.
Les juges lillois ont estimé que l’internaute avait bien réalisé des actes de contrefaçon et qu’il avait également commis des actes de concurrence déloyale. Pour cela, ils se sont appuyés sur le caractère notoire de la marque et sur le risque de confusion qui pouvait en résulter pour les consommateurs.
Le choix de la procédure civile n’est sûrement pas anodin. En effet, si Lancôme avait opté pour la voie pénale, le contrefacteur aurait pu être condamné plus sévèrement, notamment à une peine d’emprisonnement comme le montre le jugement du TGI de Paris du 30 avril 2007. Mais elle aurait perçu des dommages et intérêts plus faibles. Ainsi, dans l’affaire précitée, la société Hermès avait reçu 1 500 euros, soit 10 fois moins que Lancôme.

VIE PRIVÉE ET PREUVE : FORCE ET FAIBLESSE DU MAIL.

Posté par Arnaud Pelletier le 16 novembre 2007

Article publié le 12/11/2007
Sur droit-ntic.com

Synthèse des principales décisions intervenues dans le contexte de l’email utilisé comme moyen de preuve.

Cour de Cassation, Ch. Sociale, arret du 6 mars 2007

Synthèse

Un mail est recevable à titre de preuve. Il peut constituer un écrit électronique opposable à son auteur. Dans cette affaire, une sanction disciplinaire avait déjà été prononcée par mail, de sorte qu’un licenciement ultérieur fondé sur les mêmes faits n’était plus justifié. En effet, les mêmes faits ne peuvent être une seconde fois sanctionnés.

Détail

Dans sa décision en date du 2 mars 2007, la Cour de Cassation a considéré qu’un courrier ainsi qu’un courriel étaient des documents au moyen desquels l’employeur pouvait (de manière efficace au plan juridique) adresser des reproches à un salarié.

Ainsi, la Cour d’Appel a pu souverainement juger, sans que sa décision ne soit remise en cause par la Cour de Cassation, que ces écrits (écrit papier et écrit électronique) constituaient des sanctions disciplinaires.

En conséquence, le licenciement d’une salariée, pour différents faits, déjà sanctionnés au moyen d’un courrier et d’un courriel, pouvait être qualifié d’abusif : les mêmes faits ne peuvent être une seconde fois sanctionnés.

La Cour confirme ainsi, s’il était besoin, la recevabilité d’un courriel à titre de preuve, qui devient, de ce fait, opposable à son émetteur. Précisons qu’en l’espèce, celui-ci était dûment identifié et ne contestait pas être l’émetteur du courriel.

Le courriel est aujourd’hui l’écrit électronique le plus utilisé, ce qui nous conduit à rappeler que l’écrit sur support électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier (C. civ. art. 1316-3). Il est ainsi admis qu’un contrat peut être conclu par échange de courriels, qu’une mise en demeure peut-être valablement émise par courriel (lorsqu’un texte, un marché ou un contrat, n’imposent pas une forme particulière et différente) ou encore qu’une démission peut être valablement effectuée par courriel.

Bien entendu, pour éviter (…limiter) les débats autour de la preuve, il est souhaitable de définir les règles du jeu, soit dans une charte informatique, le cas échéant dans le règlement intérieur ou les contrats de travail. Le mieux est d’y inclure une convention de preuve comme l’autorise l’article 1316-2 C. civ. : « Lorsque la loi n’a pas fixé d’autres principes, et à défaut de convention valable entre les parties, le juge règle les conflits de preuve littérale en déterminant par tous moyens le titre le plus vraisemblable, quel qu’en soit le support. »

Cour de Cassation, Ch. Sociale, arret du 30 mai 2007

Synthèse

Pour qu’un courriel, émis par un salarié au moyen des outils informatiques mis à sa disposition par l’employeur présente un caractère personnel donc confidentiel, il doit être identifié comme tel.

Il est rappelé que par défaut, les courriels émis au temps et au lieu de travail ont un caractère professionnel.

Détail

Un salarié a été licencié pour faute grave le 13 octobre 2002.

Pour juger le licenciement sans cause réelle ni sérieuse, la Cour d’Appel a considéré que les deux messages électroniques adressés par le salarié à l’une de ses collaboratrices sur le lieu de travail, ne comportant aucun élément professionnel, constituaient des correspondances privées.

La Cour d‘Appel a donc estimé que l’employeur ne pouvait pas en prendre connaissance. Ainsi et a contrario pour considérer qu’un mail est professionnel selon cette décision, il faudrait qu’il soit expressément identifiable comme tel. Une telle solution érigerait en règle de principe l’usage personnel (donc confidentiel), des moyens de communication mis à disposition des salariés par l’employeur.

Pour qu’un mail ait un caractère professionnel, il faudrait qu’il comporte des éléments d’indication en ce sens. Ceci est l’inverse de ce qui est habituellement admis.

C’est donc logiquement et dans le prolongement de l’arrêt Nikon précité que la Cour de Cassation estime qu’en statuant ainsi, sans rechercher si les fichiers ouverts sur le matériel mis à disposition par l’employeur avaient été identifiés comme personnels par le salarié, la Cour d’Appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

L’arrêt d’appel est en conséquence cassé et annulé.

Cour de Cassation, Ch. Sociale, arret du 6 juin 2007

Synthèse

Le caractère personnel d’un courriel le rend impropre à justifier un licenciement, en l’absence de trouble objectif caractérisé par sa divulgation, même s’il a été volontairement divulgué par son destinataire qui l’a communiqué en justice.

Détail

Un salarié est licencié après avoir adressé à un de ses collègues de travail en procès contre leur employeur, une attestation (qualifiée de fausse par l’employeur) et un mail (qualifié d’insultant et de méprisant à l’égard de ses supérieurs hiérarchiques par l’employeur) tous deux produits en justice par le destinataire.

La Cour d’Appel ayant retenu (souverainement) le caractère privé du courriel et ayant fait ressortir qu’il n’a pas causé de trouble objectif caractérisé dans l’entreprise, en a exactement déduit que cet élément de la vie personnelle de l’intéressé ne pouvait constituer un motif de licenciement.

Le caractère personnel du courriel le rend impropre à justifier un licenciement, fût-il insultant et méprisant, fût-il communiqué volontairement en justice par son destinataire.

Cour de Cassation, Ch. Sociale, arret du 23 mai 2007

Synthèse

Lorsque un employeur a des motifs légitimes de suspecter des actes de concurrence déloyale, une ordonnance peut autoriser un huissier de justice à accéder aux données contenues dans l’ordinateur mis par l’entreprise à la disposition du salarié, et à prendre connaissance pour en enregistrer la teneur, des messages électroniques d’un salarié, a
vec deux personnes identifiées (manœuvres déloyales tendant à la constitution d’une société concurrente).

Détail

L’article 145 du Nouveau Code de procédure civile (NCPC) dispose que, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête (c’est-à-dire à l’insu du défendeur) ou en référé (c’est-à-dire contradictoirement).

Par ailleurs, le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect à l’intimité de sa vie privée, ce qui implique en particulier le respect du secret des correspondances et tenant en conséquence pour une atteinte à une liberté fondamentale la prise de connaissance par l’employeur, en violation de ce secret, des messages électroniques émis et reçus par le salarié au moyen de l’outil informatique mis à sa disposition par l’entreprise (cass. Soc. 2 oct. 2001, SA Nikon France/Ord. Jurisdata n° 2001-011137).

Dès lors l’article 145 du NCPC précité permet-il de donner mission à un huissier d’accéder aux données contenues dans l’ordinateur mis à la disposition du salarié par l’employeur et à prendre connaissance, pour en enregistrer le contenu, des messages électroniques échangés par le salarié avec deux personnes étrangères à l’entreprise avec lesquelles le salarié aurait des relations constitutives de concurrence déloyale.

La Cour de Cassation pose le principe selon lequel la vie personnelle du salarié ne constitue pas en tant que telle, un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du nouveau Code de procédure civile dès lors que le juge constate que les mesures qu’il ordonne procèdent d’un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées.

Une ordonnance peut donc autoriser un huissier de justice, lorsque l’employeur a des motifs légitimes de suspecter des actes de concurrence déloyale, à accéder aux données contenues dans l’ordinateur mis par lui à la disposition du salarié, et à prendre connaissance pour en enregistrer la teneur, des messages électroniques échangés par l’intéressé avec deux personnes identifiées, étrangères à l’entreprise, et avec lesquelles elle lui prêtait des relations constitutives, à son égard, de manœuvres déloyales tendant à la constitution d’une société concurrente.

Il est précisé qu’en l’espèce, l’huissier avait rempli sa mission en présence du salarié.

Ainsi, un employé, fonctionnaire ou agent, ne saurait-il s’abriter derrière le droit au respect de la vie privée comme sorte d’«immunité diplomatique» lui permettant d’agir à sa guise sans crainte de poursuites.

En l’espèce, la Cour de Cassation a relevé, que cet élément de la vie privée n’avait « pas causé de trouble objectif caractérisé dans l’entreprise », et qu’ainsi, la vie personnelle de l’intéressé ne pouvait pas constituer un motif de licenciement.

Notons qu’il n’y a pas de violation de la vie personnelle du salarié par l’employeur dans cette affaire, mais une révélation volontaire d’un courriel personnel par le destinataire du message.

La Cour de Cassation note qu’en l’absence de trouble objectif caractérisé, à la suite de la divulgation, il n’y a pas de motif de licenciement.

A contrario, un tel trouble aurait pu justifier un licenciement.

Prenons deux exemples :

1/ Exemple de trouble n’ayant pas justifié une rétrogradation :
Cette notion est importante, le chauffeur d’un dirigeant s’est abonné à une revue échangiste en mentionnant son adresse professionnelle. Parvenue dans l’entreprise, l’enveloppe contenant la revue, a été ouverte conformément à la procédure habituelle et connue du chauffeur. Elle ne comportait aucune indication du caractère personnel de l’envoi. Le contenu de l’enveloppe a ensuite été porté au standard au vu des salariés.

En raison de l’émoi provoqué par la présence de ce magazine, l’employeur a rétrogradé le chauffeur. La Cour, réunie en chambre Mixte (Cass. Soc. Ch mixte, 18 mai 2007, n° 05-40-803) a réaffirmé le principe constant selon lequel on ne peut pas reprocher à un salarié son comportement privé, dès lors qu’il ne nuit pas aux intérêts de l’entreprise. Ainsi, le fait de se faire adresser sur son lieu de travail une revue, aussi pornographique soit-elle, « ne constitue pas un manquement aux obligations résultant du contrat de travail ».

2/ Exemple de trouble ayant justifié un licenciement :
Un chauffeur de poids lourds s’est vu retirer son permis de conduire pour des faits de conduite sous l’emprise d’un état alcoolique en dehors de ses heures de travail (Cass. Soc., 2 déc. 2003, n° 01-43-227). La Cour a considéré que son licenciement pour faute grave était justifié car, dans ce cas et même pour des faits survenus au temps de la vie privée, l’intérêt de l’entreprise s’en trouvait sérieusement mise en cause. Cela a provoqué un trouble objectif caractérisé.

Arnaud TESSALONIKOS
Avocat counsel
Département Informatique et Réseaux

L’objectif de ce blog créé en 2006, qui n’est pas à proprement parler un blog puisque je ne donne que très peu mon avis, est d’extraire de mes veilles web informationnelles quotidiennes, un article, un billet qui me parait intéressant et éclairant sur des sujets se rapportant directement ou indirectement à la gestion de l’information stratégique des entreprises et des particuliers.
Depuis fin 2009, je m’efforce que la forme des publications soit toujours la même ; un titre, éventuellement une image, un ou des extrait(s) pour appréhender le sujet et l’idée, l’auteur quand il est identifiable et la source en lien hypertexte vers le texte d’origine afin de compléter la lecture.
En 2012, pour gagner en précision et efficacité, toujours dans l’esprit d’une revue de presse (de web), les textes évoluent, ils seront plus courts et concis avec uniquement l’idée principale.
En 2022, les publications sont faite via mon compte de veilles en ligne : http://veilles.arnaudpelletier.com/
Bonne découverte à tous …


Arnaud Pelletier

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