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Web et vie privée …
Certes, si un de ces amis travaille pour le Fisc, la Caf, les Assedics ou la gendarmerie, il peut utiliser les informations que vous publiez pour vous trahir, si ces informations concernent ses fonctions. Autrement dit, si un agent de la Caf se crée un profil bidon pour devenir votre ami sur Facebook et ainsi récolter des infos sur vous, sa décision sera dépourvue de fondement légal. Quelles sont les conditions pour qu’une information publiée sur un profil Facebook serve de preuve ? En premier lieu, pour être valide, tout constat fait sur internet et qui vous est opposé doit avoir été fait par un huissier : pas de constat d’huissier ? Foncez supprimer l’élément litigieux, et vous gagnerez toute procédure qui suivrait.
Ensuite, une information publiée par vous, si elle l’a été sur un profil privé et indiqué comme tel, EST une information privée, c’est ce que dit la jurisprudence.
Enfin, et contrairement aux affirmations de Me Bensoussan, avocat spécialisé en droit de l’Internet, il existe bien de la jurisprudence en la matière, notamment une décision d’un tribunal correctionnel ayant relaxé un motard qui avait filmé sur Youtube ses exploits de vitesse, considérant la vidéo comme insuffisante pour prouver quoique se soit
En ce qui me concerne pour Overblog, environ 80% des demandes relatives à la vie privée sont justifiées et entraînent un retrait immédiat du contenu notifié. Pour les 20% restant, il s’agit de demandes malintentionnées ou injustifiées : j’ai ainsi reçu une fois une notification de l’ex-concubine d’une personne demandant le retrait des photos de cette personne avec sa nouvelle concubine … Quoiqu’il en soit, chaque demande est traitée au cas par cas, et j’essaye de faire en sorte que ce soit en un temps record. Au plus, cela prend rarement plus de 48h pour qu’une demande ait reçu une réponse, positive ou négative. La LCEN ne vous demande pourtant pas d’être juge des atteintes à la vie privée. Comment trancher le dilemme ? La LCEN demande d’intervenir sur le contenu « manifestement illicite ». En ce qui me concerne, lorsqu’une personne me notifie qu’elle a constaté sur un blog des photos d’elle privées, encadrées de commentaires injurieux, je me doute que cette personne n’a certainement pas donné son accord pour une telle diffusion, qui plus est dans ce contexte, et j’assimile cette atteinte à la vie privée à du manifestement illicite. En insérant cette définition de « manifestement illicite », la LCEN fait de facto des responsables juridiques des plates-formes d’hébergement des « juges des atteintes à la vie privée », mais je pense que tout le monde comprendra que c’est d’abord à chaque fois du cas par cas, et que c’est surtout dans l’intérêt des personnes visées par l’atteinte que d’avoir un interlocuteur chez l’hébergeur, plutôt que d’avoir à aller devant le juge… Finalement, ces questions sont en filiation directe avec le fameux droit à l’oubli, dont on entend aujourd’hui beaucoup parler. Que vous inspire ce concept ? Pensez-vous qu’il faille l’ériger en droit constitutionnel, comme le préconise Alex Türk ? Je demande à tous d’être extrêmement prudents sur cette fameuse notion de « droit à l’oubli ». D’abord, les hébergeurs interviennent normalement immédiatement pour toute notification de contenu manifestement illicite : si une photo de vous se trouve sur un site, un blog sans votre autorisation, le droit à l’image vous autorise à en demander le retrait (attention aux cas particuliers, notamment les photos de groupe). Je m’étonne donc que l’hypothèse de la demande de retrait de photos « compromettantes » soit le principal argument ressorti le plus régulièrement pour justifier la création de ce fameux droit à l’oubli, notamment par le président de la CNILl Alex Türk : pour moi, le droit à l’image se suffit déjà amplement.
Par ailleurs, j’appelle à la vigilance de chacun : je me doute que le législateur agit avec les meilleures intentions du monde lorsqu’il souhaite instaurer un droit à l’oubli, mais pour moi, il est évident que ce droit à l’oubli pourrait aussi et surtout malheureusement servir à un politique, qui aurait au cours de son mandat fait des déclarations maladroites ou mensongères, de se refaire une « virginité » sur le réseau à l’approche d’échéances électorales, au détriment de la nécessaire information des électeurs. Au regard de ce risque-là, et parce que je trouve que globalement, un internaute dispose déjà aujourd’hui de l’arsenal juridique nécessaire pour faire retirer des éléments propres à sa vie privée, alors je suis plutôt contre la création …
Marc Rees